Pratiques institutionnelles : "On ne badine pas avec les semblants"

Nous organisons cette année, au lieu des 4 après-midis habituelles, une journée. Et si vous êtes un.e professionnel.le du psycho-médico-social-éducatif, ou si vous êtes étudiant.e et vous vous formez aux métiers de ces champs alors vous avez la bienvenue au sein de cette journée.

Après avoir travaillé ces dernières deux années autour de deux thématiques essentielles pour nos métiers* il nous est apparu comme logique que cette année nous allions mettre au travail la question de l’usage des semblants.

La catégorie du semblant -loin d’être pur  artifice, illusion ou feinte-, nomme ce point fictif mais essentiel pour saisir le réel. Une conséquence clinique s’en déduit,  cruciale pour tout travail en institution : on ne badine pas avec les semblants.

Nous nous appliquerons à la tâche d’approcher -pour nous le rendre opératoire dans nos pratiques- ce concept de semblant.

Car le bon usage des semblants ouvre la voie vers des pratiques permettant aux sujets -enfants, adolescents ou adultes- de   traverser les épreuves de leur vie sans être figés en catégories.

Les politiques de santé et d’éducation animées par des idéaux sécuritaires et de réduction de coûts mais aussi l’alliance des discours scientiste et capitaliste ont permis une certaine fascination pour les protocoles et les méthodes promettant un reste de risque le plus proche possible de zéro. Que ce soit sous forme de questionnaires, d’items édictés pour prescrire la façon de gérer les entretiens, les mesures à appliquer pour gérer les situations, etc. les protocoles et les savoirs de maîtrise ont des effets délétères.

D’une part ils rendent les pratiques tristes -pas de rencontre possible, pas d’appréhension de l’autre dans sa fondamentale altérité. Le protocole - réponse universelle avant toute question singulière-, ferme toute possibilité pour un sujet de faire entendre sa douleur singulière d’exister et les modalités toujours singulières selon lesquelles la rencontre manquée avec la jouissance s’est manifestée pour lui.

D’autre part, ces protocoles et « bonnes pratiques » sont là pour faire oublier aux intervenants et aux institutions que leur fonction, l’exercice de leur fonction repose sur les semblants ; en ce sens que ces fonctions et ces institutions sont de réalités de langage et qu’elles n’opèrent que de là. Car le grand refoulé d’aujourd’hui est que l’Homme est avant tout être de langage. A l’encontre des protocoles nous avons à faire place et à nous intéresser « au langage concret que parlent les gens » de manière à isoler des significations qui ne valent que pour le sujet qui parle.

Or, psys, enseignants, éducateurs, parents même, etc. plus nous nous identifions à notre fonction, moins notre intervention pourra constituer un appui pour le sujet. Parce que tout adulte ayant la charge d’accompagner un enfant, un adolescent ou un autre adulte en souffrance a à savoir que pour lui aussi la jouissance a dû condescendre au désir ; qu’il doit lui aussi répondre au réel de sa jouissance par les solutions qu’il a lui-même dû bricoler et qui lui ont permis de troquer jouissance en plaisir, désir, amour. D’ailleurs, y parvient-on tout à fait ? Qui pourrait le prétendre ?

 

Ce samedi 24 juin nous travaillerons à partir de situations cliniques et de cas de notre pratique, amenés par des professionnels au sein des écoles, lieux d’accueil pour la souffrance adolescente, lieux d’écoute et accueil pour femmes victimes de violences mais nous entendrons aussi le père d’un jeune enfant autiste. A partir de leur témoignage précis nous tenterons de préciser qu’est-ce que cela veut dire un entretien, un échange de paroles, l’écoute et la réponse, comment se servir de cette dimension de semblant, seule capable de permettre d’accompagner un sujet à ce qu’il trouve à son tour un semblant à sa mesure, semblant capable de venir mordre sur le réel auquel il a affaire et qui engendre pour lui souffrance, rupture de lien, exclusion.

Pratiques institutionnelles :